Ecoute, c'est la mer qui roule

Elle me regarde avec cet air qu'elle affectionne. "Regarde comme je fais bien le regard de celle qui voudrait se faire plaindre mais qui en rigole avec un sourire en coin".
Ellle a mis ces bottes qui lui montent au dessus du genou, et cette résille cyan fâné, qui se confond avec sa peau.
- Tu reprends un autre verre ?
Je lui souris. Je dis :
- Oui.
Ses tétons ne pointent pas sous son débardeur en lycra. Pourtant elle est saoule, grisée. Il faut la tenir en alerte. Sinon, elle se mettra à être mélancolique, ou à s'apitoyer sur elle-même. Elle aime tant se faire plaindre. C'est un mode de séduction. Qu'elle tient de cette période où elle ne pouvait se faire confiance.
Elle est superbe. Ce tailleur pied de poule rose orangée lui va à ravir. La fait rire à pleine voix.
J'aime par dessus tout lorsqu'elle s'habille comme ça. Qu'elle se regarde dans la psychée en choisissant celle qu'elle veut être ce soir là. Qu'elle entend sa bourgeoise de mère lui dire :
- tu es vraiment habillée comme une pute, ma chérie.
Ca redouble son désir carnassier.
Combien de fois avons nous fini ensemble ces soirées où elle déconnectait de sa gangue sociale ?
Elle peut dater précisément la première fois. La première fois qu'elle était infidèle au corps de l'homme qu'elle aimait. Moi aussi. Je savais que cet homme était parti. C'est mon ami.
Le désir avait rattrapé notre amitié. Il l'a renforçait. Se rendait de plus en plus sourd. Et pressant. Il falllait se préparer à l'acte. Au contact de nos deux corps. A l'examen de nos libidos. Tranquilement. Pour évacuer toute tentation d'abandon autre que charnel. Pour canaliser l'émotion. Et passer à autre chose.
Le premier orgasme nous électrisa. Les suivants nous dispersèrent, nous transformèrent.
Addictifs. On créa une unité de vie supplémentaire. A nous. Une sphère sexuelle et intellectuelle. Avec quelques complicités. Contaminées. Consentantes.
Combien de fois avons nous passé ces soirées à nous ignorer ? A en séduire d'autres. Moi, en corps à corps, sur le dance floor. Elle, avachie sur ses admirateurs. Allumeuse. Excitante.
Ne pas partir ensemble. Ne pas faillir. Se retrouver, et tout dévaster. Elle dans son appétit d'ogresse, incapable de se rassasier. Moi défoncé de plaisir, concentré sur le sien.
- Un
mojito ?
J'aime boire avec elle. En solo. En public. Deux célibataires, désormais. Deux anciens amants.
- Je n'aspire pas à être ton ex-amante. Je n'aime pas que tu penses ça.
Je sais. Tu aimes pouvoir m'appeler en fin de soirée. Au cas où je n'aurais rien d'autre à faire que de remplacer le goujat que tu t'apprêtes à jeter hors de chez toi. Tu le retiendras encore, pour qu'éventuellement il me rencontre à l'entrée de ton immeuble.
Tu sais. Je n'ai que rarement su te dire non.
Tu me regardes. Interrogative. Espiègle. Tes yeux gris qui se plissent. C'est toujours mieux en plissant les yeux.
- Tu as l'air en pleine forme. Tu n'es pas en manque d'amantes, à ce que je vois.
Je secoue la tête. Amusé. Je dis :
- Je ne sais pas si j'ai encore suffisament envie de toi pour te satisfaire, ma nymphéa chérie.
Tu te lèves. Tu contournes la table, d'un pas assuré. Les pointes de tes seins tendent le tissu, maintenant. Tu t'assois sur moi. Tu avales ma langue. Tu ris. Tu te tournes vers le patron.
- Combien je te dois ?
 
sonnyboy a dit:
C'est eux (les men in black) qui rapportent les sous.
Heureusement pour nous il reste encore des gens ambitieux dans notre pauvre pays.
Arf !!!!!!!!!! Tu vois, ce qui me fait bien marrer, c'est qu'ils sont "interchangeables" ... ils font partie de la génération Kleenex qu'on prend et qu'on jette comme on le souhaite ... t'en a vu un, t'en vois dix ou cent ... ils sont pareils !
Ils ont le sentiment de faire partie de "l'élite", ils restructurent, virent, condamnent sans crainte et sans haine, d'une simple griffe sur un bout de papier...
Ils ont l'oeil rivé sur les courbes de progression, les "trends" de profit ...
Maintenant, chez nous, la mode est à la "vidéo-conférence" ... on se voit ... on se parle ... mais on ne se touche plus ... on ne se serre plus la main ... on ne se tape plus sur l'épaule ... on ne va plus prendre un pot ensemble après la réunion...
Je suis trop "vieux" pour ça ... trop "humain" pour tout ce fatras impersonnel ... ce monde m'est inconnu et déstabilisant !
Pourtant ... une simple poignée de mains ... est-ce trop demander aujourd'hui !
Question de temps ... quelques semaines ou quelques mois ... ils s'apercevront bien vite que je suis en dehors de tout "profil" acceptable par eux ... et ce sera très bien comme ça !
Il y a des moments ou il faut savoir prendre congé, faire comme un champion cycliste : se retirer en pleine gloire avant de décrépir en tirant la langue, accepter de devenir un dinosaure ou une pièce de musée et en tirer fierté !
Anecdote : je visitais un plateau de bureaux superbement équipés dans un environnement super-luxueux ... une centaine de personnes y travaillaient dans un silence quasi-religieux - j'étais étonné de ne voir aucune workstation mais uniquement des laptops de dernière génération !
Devant mon étonnement, le gars qui me guidait partit dans un éclat de rire et me dit : "vous savez, ici, dans nos bureaux, à quelques exceptions près, il n'y a plus de places pré-déterminées pour chacun ! Vous arrivez, vous prenez une place libre, vous branchez votre laptop et hop ... vous travaillez !!!"
Je répondis simplement : "Ah bon ! et les dossiers alors ???" - le gars me dit alors : "allez, je vous emmène au "scan-center" !!!"
Tidju !:eek:
 
thebiglebowsky a dit:
Il y a des moments ou il faut savoir prendre congé, faire comme un champion cycliste : se retirer en pleine gloire avant de décrépir en tirant la langue, accepter de devenir un dinosaure ou une pièce de musée et en tirer fierté !
Ben, moi, j'ai pour ainsi dire "pris congé" avant d'être devenu champion cyliste:D Je bosse, mais les ambitions professionnelles, ce n'est pas et ça n'a jamais été mon truc. Alors, Sonnyboy a peut-être raison (encore que...je ne sois pas persuadé que ce soit toujours les gestionnaires et les commerciaux qui fassent avancer les choses, même si je veux bien croire qu'ils ont leur utilité) sur les men in black qui "rapportent l'argent" mais l'argent, une fois qu'on a de quoi, je n'ai aucune envie de courir derrière pour en faire le "pourquoi" de la vie. L'ambition des "men in black" n'est qu'une ambition parmi d'autres, on n'est pas obligé d'avoir la même.

Je sais, c'est un discours de privilégié, mais il y a plein de privilégiés qui s'ignorent, faut pas les laisser dans leur ignorance.:D
 
Roberto Vendez a dit:
C'est magnifique de justesse et de sensibilité... Et aussi de désenchantement.

Pas de désenchantement, mais de réalisme. Ce qui est terrible dès que l'on aborde ce sujet, c'est de constater à quel point les deux se ressemblent. Finalement c'est à se demander si nous n'aimons pas que les garces, simplement parce qu'au moins les choses sont claires.

Bon, allez, la route encore. Ce soir Lyon.

;)
 
Amok a dit:
Pas de désenchantement, mais de réalisme. Ce qui est terrible dès que l'on aborde ce sujet, c'est de constater à quel point les deux se ressemblent. Finalement c'est à se demander si nous n'aimons pas que les garces, simplement parce qu'au moins les choses sont claires.
Heureusement (ou malheureusement, je n'en sais rien !), mon expérience garcesque est pratiquement inexistante....
Tout ce que je sais, c'est qu'avec mon romantisme effréné et ma tendance à vouloir absolument tout idéaliser, j'aurais été ce qu'on appelle communément en Belgique "un oiseau pour le chat" !!!
Certain qu'avec quelques "garces bien trempées" sur mon chemin, je n'aurais jamais atteint mes 55 ans actuels !!!
Tidju ... Dieu m'en préserve !!!:eek:
 
Amok a dit:
Pas de désenchantement, mais de réalisme. Ce qui est terrible dès que l'on aborde ce sujet, c'est de constater à quel point les deux se ressemblent. Finalement c'est à se demander si nous n'aimons pas que les garces, simplement parce qu'au moins les choses sont claires.

Bon, allez, la route encore. Ce soir Lyon.

;)

Non, ce n'est pas de garce, dont le texte parle. Le narrateur est le prédateur. Le rôle d'homme objet, qu'il endosse ici, n'est qu'une stratégie de séduction parmi d'autres.
L'essentiel est bien que les choses soient claires.
:zen:
 
camisol a dit:
Non, ce n'est pas de garce, dont le texte parle. Le narrateur est le prédateur. Le rôle d'homme objet, qu'il endosse ici, n'est qu'une stratégie de séduction parmi d'autres.
L'essentiel est bien que les choses soient claires.
:zen:

Bien compris ;) La reflexion était d'ordre général.

Bon, je file! :D

Si j'avais le temps je te dirais bien que dans ton texte il n'y a pas de prédateur, juste deux fauves qui jouent ensemble, mais bon, je n'ai pas le temps, alors je ne le dis pas :D
 
Amok a dit:
Si j'avais le temps je te dirais bien que dans ton texte il n'y a pas de prédateur, juste deux fauves qui jouent ensemble, mais bon, je n'ai pas le temps, alors je ne le dis pas :D

C'est bien dit.
;)
Bonnes lyonnaiseries :D
 
camisol a dit:
Non, ce n'est pas de garce, dont le texte parle. Le narrateur est le prédateur. Le rôle d'homme objet, qu'il endosse ici, n'est qu'une stratégie de séduction parmi d'autres.
... je viens de m'apercevoir avec un certain désenchantement que jamais je n'aurai été un "séducteur" ni que jamais je ne le deviendrai !!!
Comme je marche au "feeling" et au "sentiment", j'aurai été bien incapable de développer des stratégies de séduction sophistiquées...
Mais la question est : "ai-je raté quelque chose ???" - ça, je ne le saurai probablement jamais !!!
 
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Réactions: nato kino
Amok a dit:
Pas de désenchantement, mais de réalisme. Ce qui est terrible dès que l'on aborde ce sujet, c'est de constater à quel point les deux se ressemblent. Finalement c'est à se demander si nous n'aimons pas que les garces, simplement parce qu'au moins les choses sont claires.

Bon, allez, la route encore. Ce soir Lyon.
;)

camisol a dit:
Non, ce n'est pas de garce, dont le texte parle. Le narrateur est le prédateur. Le rôle d'homme objet, qu'il endosse ici, n'est qu'une stratégie de séduction parmi d'autres.
L'essentiel est bien que les choses soient claires.
:zen:

Amok a dit:
;)

Oui, ca valait le coup de passer par ici.

Ouah ! C'est vrai ça vaut le coup de passer par là !
Finesse, sensibilité, vos mots sont beaux. Comme il est instrucrif de vous lire.

* "Toutes les garces aiment les garçons" - JF Coen

Mais comment sait-on si on est véritablement une garce ou non ?
 
loudjena a dit:
Mais comment sait-on si on est véritablement une garce ou non ?

Ca n'a que peu d'importance. L'important est de jouir sans entraves. :cool:
En ce sens, tu ne connais la réponse à ta question quand dans l'intimité. Tu n'es qu'une garce si seul ton plaisir t'intéresse...
:style:
:rateau:
:rolleyes:
 
La tête vide, complétement, c'en était même absurde..
Dans mon cabinet de travail, au milieux d'un joyeux bric à brac, j'essaye de me remémorer des images pour servir de toile de fond à mes fantatsmes...
Qu'il est doux de capter les parfums et les textures de la Vie....
Mes fantasmes se conforment à des scénarios bien ciblés.
Je cherche encore dans ma mémoire ces instants magiques qui font Aimer la Vie à nouveau...
Faut-il avoir peur, à force de piller des univers intimes ...???

:style:
 
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Réactions: cecil
camisol a dit:
Ca n'a que peu d'importance. L'important est de jouir sans entraves. :cool:
En ce sens, tu ne connais la réponse à ta question quand dans l'intimité. Tu n'es qu'une garce si seul ton plaisir t'intéresse...
:style:
:rateau:
:rolleyes:

"Dans l'état pulsionnel la recherche d'un équivalent du phantasme répond à sa contrainte ; l'unité organique qui la subit en tant qu'irrésistible jouissance tend à s'en acquitter, parce que comptable de cette obsession stérile eu égard à la solidarité spécifiques des unités entre elles.

Tout équivalent, au niveau de l'unité organique de l'individu, représente par conséquent une double sanction : celle de la contrainte interne et de l'affirmation de soi externe ; d'où le dilemne : jouis sans t'affirmer ou affirme-toi sans jouir pour seulement subsister."

je te fais confiance à la fois pour re-situer le texte dans le court et (très) dense essai dont il est issu (cherchez pas, je ne l'ai pas pompé sur le net tout ça... :D ) et pour l'auteur (que tu trouveras plus rapidement) :heu: :hosto: :affraid:

ps : désolé pour les autres, j'avais envie de lui sortir ce passage depuis hier à la lecture de ce post, désolé que vous ayez à subir cela (dès le matin en plus) :D
 
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Réactions: nato kino
camisol a dit:
Queqlues vies... Mais l'important est que la tienne te suffise. Bises. :love:
:love:
Quand j'étais mioche, Papa m'a souvent expliqué "la vie" ... il m'a éduqué dans la fraternité et le respect des autres ... de tous les autres ! J'ai encore des centaines de "leçons de vie" qui trottent dans ma tête et que, au fil du temps, j'ai toujours essayé de mettre en pratique... parfois tant bien que mal d'ailleurs...
Il m'avait expliqué aussi que le facteur "chance" était aussi très important et la chance, j'en ai eu ... beaucoup d'ailleurs ...!
Il me parlait du hasard, des rencontres fortuites qui ne le sont pas, de l'enseignement que l'on peut tirer du moindre humain qui passe à sa portée...
Il m'a appris à écouter le vent qui chante dans les arbres, à m'extasier devant la plus humble de fleurs de prairie, à savoir regarder non pas avec les yeux mais avec le coeur...
La plus importante de ses leçons : ne jamais se prendre au sérieux et considérer la vie comme une cour de récréation dans laquelle on ne fait que passer...
Comme il disait : A.H.D. (Amour, Humour, Dérision) ...
Jamais il ne m'a parlé d'argent ou de carrière ... il n'avait ni l'un ni l'autre et se sentait libre et heureux...
Durant toute ma jeunesse, j'ai eu devant les yeux le tableau du couple qu'il formait avec ma Mère ... un couple uni, heureux, libertaire aussi ou la confiance était érigée en ligne directrice... ils s'aimaient et ça se voyait ... ça se sentait ...
Tout en vivant ma propre vie et en suivant mes propres aspirations, je me suis toujours considéré en tant que dépositaire de ces leçons de vie avec le devoir de les transmettre à mes enfants ... ce que j'ai fait ... du mieux que j'ai pu ... avec les moyens dont je disposais...
Maintenant, souvent je regarde vivre mes enfants ... je les sens proches et heureux et j'en suis heureux...
Alors, à la question de savoir si ma vie me suffit, je répondrai simplement que si j'en avais l'occasion, je signerai encore pour 10, 20 ou 100 vies pareilles ... telles quelles ... sans rien changer... mêmes parents, même femme, mêmes enfants et ... même moi !:D
Jusqu'à présent, le destin m'a gâté, chouchouté, épargné ... que puis-je faire d'autre que d'afficher de la reconnaissance vis-à-vis de la vie à part peut-être regretter amèrement que nous ne soyons pas tous égaux devant le bonheur...:(
Et oui, que voulez-vous, je ne suis pas un "client" pour la télé-réalité ... je n'ai rien à raconter dans le style "c'est du Zola" ... même les tartines qu'on bouffait quand on n'avait plus de fric avait le goût et l'odeur d'un festin de roi...:D
 
Euh ! Non ! je n'ai jamais voulu être curé.....:D
Mais si je l'avais été, je crois que j'aurais été un "bon" curé !!!!!;) :D :D
 
Roberto Vendez a dit:
Finalement tu aurais été nommé Pape, charge que tu aurais accompli avec un enthousiasme de chaque jour, tu aurais décidé de réformes vachement gonflées, par exemple il y aurait eu des gardes Suisses femmes avec des uniformes ajustés, etc.
Arfffffff !!!! Trop d'honneur Roberto !!!!!:D :love: :zen:
C'est vrai qu'une bigomobile blindée me changerait un peu de ma (pou)RAV 4 !!!!!:D
Même qu'avec des habits sacerdotaux ... plus besoin de bagnole du tout ... Arffffff !!!!!:D
Sans compter les avantages indirects : la robe papale par exemple qui te permet de te gratter sans avoir l'air d'y toucher... la cérémonie du lavage de pieds de jolies filles en minijupes ... se faire baiser l'anneau en toute impunité et au vu de tout le monde...
Par contre, et pour m'aider, je chercherais un cardinal avec un patronyme tout indiqué ... d'ailleurs, je crois connaître quelqu'un qui conviendrait parfaitement...!!!:D
Arfffff !!!!!!!!!!
:rateau:
 
4° C'est moi (et non Jésus-christ) qui ai été crucifié au Golgotha, et je l'ai été pour m'être élevé contre dieu et son christ,
parce que je suis un homme
et que dieu et son christ ne sont que des idées
qui portent d'ailleurs la sale marque de la main d'homme;
et ces idées pour moi n'ont jamais existé

Mais si je suis mort il y a deux mille et quelques années sur une croix je vous fous mon billet que cette fois-ci on ne m'aura pas dans une cellule d'asile, une casemate de fort ou les chiottes d'une prison, et ma conscience ne sera pas tranquille, ni les mânes du mort que je suis apaisés avant de vous avoir fait cuire sexe en l'air, vous le sexe en l'air, Pie XII, avec quelques uns de vos moines de Bohême ou de Moldavie sur le grand autel de Saint-Pierre-de-Rome et celui plus tendancieusement prêtre et occulte de Saint-Jean-de-Latran.

Antonin Artaud, Adresse au Pape, 1er octobre 1946.
:zen: